La suite des très bons
conseils de Mme Le Dauphin sur l’adoption en Russie
Conseils entre les 2
voyages :
Certaines régions ont des délais très longs entre les deux voyages. Essayez
d'envoyer des petites choses qui feront repenser aux nounous que l'enfant dont
elles ont à s'occuper va être adopté. Elles le prépareront à votre arrivée.
Laissez à l'enfant un doudou et des
photos. Vous pouvez aussi apprendre quelques mots de russe surtout
si l'enfant n'est plus un bébé, ça aide au début dans la communication et
cela vous permettra d'échanger quelques mots avec les nounous.
Attention : l'adoption n'est pas
faite tant que le jugement n'a pas eu lieu. Un couple russe peut à tout moment
adopter l'enfant que vous avez rencontré. Préservez vous et ne faites pas vôtre
un enfant quine l'est pas encore officiellement.
4) Retour avec l'enfant
:
Pratique : emmener une petite pharmacie pour l'enfant et pour vous. Il peut
vous transmettre certaines maladies. (et vice-versa !) Pour un enfant un
peu grand, le fait d'être adopté peut signifier plus aucun interdit. Il peut se
représenter sa famille comme des personnes qui lui donneront tout ce qu'il veut
et son nouveau pays comme un pays de cocagne où il aura accès à tout !
Il est donc nécessaire de savoir
dire non même si l'on souhaite que ces premiers moments vécus ensemble soient
idylliques…
Il en va de la suite de vos relations. Un enfant qui sort d'un orphelinat
va être soumis à des stimulations très intenses pour lui et à une fréquence
très soutenue (un réfrigérateur qui s'ouvre, un magasin avec de la musique et
des lumières, un zoo, une promenade, les cadeaux de la famille, etc……)
Le conseil serait d'avoir pendant un
certain temps la vie la plus `ennuyeuse' et routinière possible et ne pas trop
le soumettre à toutes ces stimulations à la fois.
Le faire se coucher tôt. N'introduire que peu à peu les aliments
nouveaux. Faute de quoi ces enfants auront du mal à s'habituer et vous le
feront savoir tôt ou tard soit en étant malades physiquement soit en étant mal
psychologiquement.
Concernant la crèche ou l'école, ne
pas perdre de vue que ces enfants ont l'habitude des collectivités. Il faut
néanmoins faire passer le message qu'on viendra les rechercher le soir, ne pas
avoir peur, de le dire et de le répéter !
Les enfants adoptés sont comme tous
les enfants : OUI et NON. Oui car ils ne doivent pas se sentir
différents, non car l'angoisse de la séparation se fera sentir chez eux plus
que chez les autres enfants.
Comment aborder son adoption ?
Si l'enfant ne demande pas d'aller en Russie plus tard, ne le faites pas à sa
place. Il sait qu'il n'est pas né de vous, inutile de le lui rappeler à
contretemps. Suivez votre enfant dans son questionnement, ne le précédez pas.
Faites préciser les questions, répondez à celles-ci et seulement à celles-ci et
ne donnez pas d'infos supplémentaires qu'il n'aurait pas forcément envie
d'avoir.
On a le droit de différer la réponse
à la question posée quand le moment n'est pas opportun en lui expliquant que ce
n'est ni le lieu ni le moment et que vous répondrez à sa question une fois
arrivé à la maison.
Si vous savez que ses parents biologiques l'ont abandonné car ils n'avaient pas
les moyens financiers de l'élever, vous pourrez le lui expliquer mais soulignez
bien que, quant à vous, ce n'est pas parce que certaines fins de mois sont
difficiles que vous l'abandonnerez vous aussi.
Faire comprendre à l'enfant que s'il
a été abandonné, ce n'est pas SA faute. Il y a des détails de son histoire que
l'on est pas obligé de lui dire par exemple un enfant né d'un viol.
Néanmoins, on peut indiquer à un enfant
grand que sa mère a pu dire qu'elle n'avait pas désiré la relation sexuelle
dont il est issu mais qu'elle a pourtant pu le porter en elle jusqu'à la
naissance, lui donnant toutes les chances de vivre.
N'inventez pas une belle histoire si
vous n'avez aucune précision sur les conditions de l'abandon de votre enfant,
mieux dire franchement que vous ne savez pas et être disponible pour accueillir
ses sentiments de tristesse et de frustration.
En bref : on ne peut malheureusement pas empêcher nos enfants de souffrir. On
est là pour les accompagner, les soutenir, les assurer de notre amour. On
a le droit d'être des parents imparfaits.
Il existe un piège dans l'adoption : l'enfant tant attendu finit par être un
dossier structuré dans ses moindres détails, carré, apostillé, parfait et tout
à coup, vous vous retrouvez avec un vrai enfant. Cet enfant, pourtant tant
désiré, avait fini par devenir `virtuel' et tout à coup il vous faut faire face
à l'enfant réel.
Baby blues
Il existe aussi dans l'adoption et peut apparaître après ce long parcours et la
tension nerveuse qu'il engendre. Si vous vous sentez triste, épuisé, que
vous avez l'impression que vous n'arriverez jamais à être `une bonne mère', `un
bon père'.
Ne vous sentez pas seul et anormal.
Ce moment de dépression est loin d'être rare et ne présage en rien de l'avenir,
il y a toutes les chances que vous surmontiez rapidement ce mauvais
passage. N'hésitez pas à en parler à votre conjoint, au groupe de parents
adoptants qui vous entoure, faites fonctionner votre `réseau', ne vous
formalisez pas si votre proche famille ne vous comprend pas.
Vous avez montré une telle
détermination jusqu'à maintenant qu'elle ne voit pas pourquoi vous flanchez sur
la ligne d'arrivée…
Si cette période dépressive se prolonge, allez consulter un psychologue ou un
psychiatre qui vous aidera à franchir le cap.
Troubles de
l'attachement :
Un bébé est programmé génétiquement pour s'attacher. Il saura très vite
que lorsqu'il pleure, il y aura une réponse de la part de la mère. Plus tard,
lorsqu'il sourira, on lui répondra. Quelqu'un va donc répondre à son besoin.
Jour après jour, le bébé réalise
qu'il peut compter sur une ou deux personnes particulières pour lui répondre et
satisfaire ses besoins vitaux, il apprend à reconnaître ces personnes et à leur
faire confiance, il comprend aussi qu'il a une valeur puisqu'on s'intéresse à
lui de si près : en un mot, `il s'attache' .
C'est ce schéma qui lui servira plus
tard à établir ses relations avec le monde qui l'entoure. Dans les
orphelinats, on ne répond pas forcément de cette façon.
Faute de personnel, on laisse parfois les enfants pleurer longtemps ou on
leur administre un biberon alors qu'ils n'ont pas encore faim. Ces bébés
finissent par penser qu'il est inutile de manifester ses besoins puisque la réponse est totalement imprévisible et inconstante. L'enfant
n'acquiert pas le raisonnement de `cause à effet' (je pleure donc on vient
s'occuper de moi') .
Si cette situation dure trop
longtemps, le bébé finira par se refermer sur lui-même et chercher en lui des
sources de satisfaction (balancement, repli, fascination par un objet banal).
Signes : un enfant plus grand qui
peut se précipiter sur n'importe qui en disant `maman' ou `papa' ou faire des
câlins à n'importe qui.
Cet enfant ne vous a pas reconnu et ne fait pas de différence.
Un bébé qui ne s'endort pas dans les
bras ou qui refuse le contact physique. Un enfant qui ne vous regarde pas dans
les yeux, qui réagit trop au bruit ou qui au contraire est dans sa bulle, qui
stocke de la nourriture, etc.….
Les enfants en orphelinats ont tous
un potentiel aux troubles de l'attachement plus ou moins importants. Certaines
techniques existent pour obtenir, malgré des débuts difficiles, une relation
confiante entre vous et votre bébé:
Il vous faudra user de toutes sortes de `trucs' pour stimuler la communication.
Solliciter son regard
Lorsque l'enfant est en poussette, le mettre face à vous et non face à la
route. Jouer à cache-cache. Faire coucou, etc….
Solliciter le contact physique
massages, chatouilles, lui appuyer sur le nez, les joues en émettant des sons
drôles, etc.…
Stimuler ses 5 sens chacun leur tour : par exemple l'ouïe par de la musique
(berceuses), le toucher par les doudous…
N'en faites pas trop, ne stimulez
pas les 5 sens à la fois ! Et si le bébé donne des signes de lassitude, laissez
le tranquille un moment, quitte à reprendre plus tard.
Pour les plus âgés :
Les conseils sont les mêmes que pour les bébés (adaptés à l'âge, bien sûr) mais
vous pouvez aussi lui signifier souvent qu'il est inscrit dans votre filiation
: `tu aimes le chocolat comme moi, tu as l'oreille musicale comme Papa…'
Naturellement, vous ne lui direz
jamais assez que vous l'aimez !
Bien sûr tous les troubles de l'attachement ne sont pas récupérables. Pour des
enfants plus grands, cherchez à savoir comment ils se comportent avec leurs
camarades du même âge. Se font-ils des
copains, savent-ils jouer à un jeu en respectant les règles ? Si un
enfant, ne parle pas du tout à 4 ou 5 ans, cela peut présager des troubles
graves du développement.
L'enfant ne parle t-il
vraiment pas du tout ou est-il seulement très inhibé ou déprimé ?…
Acquisition du langage :
Chercher à ce que l'enfant continue à parler russe à tout prix semble le plus
souvent un facteur de confusion pour celui-ci. Il peut tout à fait se
demander pourquoi il est ainsi si différent des autres ou même si ses
nouveaux parents n'ont pas l'intention de le renvoyer en Russie.
Aussi désolant que cela puisse nous
paraître, le russe va être oublié à une vitesse vertigineuse. Il me
semble qu'il faut respecter ce mouvement, l'enfant se jette à corps perdu et
sans regarder derrière dans sa nouvelle vie. Plus tard, s'il le désire,
il pourra réapprendre cette langue d'origine.
Le français s'acquiert très rapidement la plupart du temps, mais dans le cas
d'enfant un peu grand, il est bon que les parents apprennent quelques mots
russes pour pouvoir communiquer pendant les premiers jours de la vie en commun.
Quant au changement de prénom, c'est le premier privilège des parents que de
choisir un prénom pour son enfant. C'est une manière de signifier au
monde que cet enfant est le vôtre. Ne vous en privez pas. L'usage,
chez les parents adoptifs est de donner le prénom de leur choix à l'enfant en
premier prénom et le prénom d'origine russe en deuxième prénom.
L'enfant
pourra facilement reprendre son prénom russe comme prénom d'usage s'il le
désire plus tard. Dans le cas d'un enfant grand, demandez lui simplement
son avis : `Veux-tu garder ton prénom russe ou non ?'
Certains enfants voudront s'approprier un prénom français alors qu'il vous
semblait qu'il était préférable de ne pas les « débaptiser », ou au contraire
se sentiraient brutalisés s'ils devaient abandonner leur premier prénom.
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