26/03/2011 | Dimitri Vivodtzev (pour Aujourd'hui la Russie)
Des journalistes russes se sont rendus dans la
zone de Tchernobyl 25 ans après la catastrophe du 26 avril 1986, et ont
fait d’étonnantes rencontres.
«A
quoi doivent s’attendre les Japonais d’ici un quart de siècle dans le
pire des cas ? A une terre brulée ? A des monstres à sept têtes ?». Ce sont ces questions que se sont posées les journalistes du quotidien comprendre les conséquences réelles d’une catastrophe nucléaire» et de «voir dans quelle mesure les prévisions les plus sombres se vérifient».
Les journalistes se sont d’abord arrêtés dans l’Oblast’ de Gomel, en Biélorussie, l’une des régions
les plus sinistrées. Ils y ont découvert de véritables déserts, des
villes mortes. Au milieu de l’un de ces villages abandonnés, à Besed,
ils ont pourtant réussi à rencontrer d’irréductibles Biélorusses. Une
femme, qui ne voit pas pourquoi elle aurait du détruire sa maison et
partir s’installer en ville comme les autres, et qui a décidé de rester là avec son fils. Son troupeau de vaches qui, dit-elle, «se reproduisent normalement, n’a jamais compté autant de têtes» : plus personne ne veut de son lait ni de sa viande !
«Le mal du pays ronge plus vite que la radiation»
Baba Lena, autre vieille dame
rencontrée dans l’îlot d’habitation suivant, le village de
Bartolomeevka, où vivent sept personnes sans lumière, sans gaz ni magasins, livre une analyse typiquement russe : «toutes
les personnes de mon âge qui sont parties s’établir ailleurs sont
aujourd’hui au cimetière. Tandis que nous nous vivons, et ne connaissons
même pas l’hôpital. Le mal du pays ronge plus vite que la radiation».
Baba Lena poursuit en affirmant que la radiation en question n’est d’ailleurs visible nulle part. «Les
Japonais sont venus, l’ont mesurée, et ont dit qu’elle était plus
élevée qu’à Hiroshima après la bombe. Mais nous, nous continuons à boire
l’eau d’ici et nous n’avons rien !».
Léna et son époux ont refusé de quitter leur maison lorsque Bartolomeevka a été évacuée
«On vit plus longtemps là où on se sent bien»
Un tableau surréaliste et
difficile à croire, auquel Victor Averine, directeur de l’Institut
d’étude de la radioactivité de Biélorussie, apporte toutefois quelques
explications : «Bien sûr que le déplacement n’a pas été facile à
vivre pour tout le monde. Le villageois, habitué à sa terre, a du mal à
se faire à la vie à la ville. On vit plus longtemps là où on se sent
bien. Et ceux qui ont choisi de rester vivre dans ces villages morts s’y
sentent bien malgré tout. C’est pour cela qu’ils vivent plus longtemps,
même en se nourrissant de champignons radioactifs et de produits de leur potager contaminé».
«La nature est en mesure de vaincre de telles catastrophes»
L’expert rapporte que les prévisions concernant une forte hausse des cancers due à l’iode radioactive se sont confirmées.
En dépit des horreurs causées par les radiations, Victor Averine se montre optimiste: «nous
avons compris que la nature était en mesure de vaincre de telles
catastrophes. La zone de radiation n’est pas devenue déserte. Au
contraire, les espèces animales s’y sont même diversifiées»,
affirme Victor Averine, en niant catégoriquement qu’il ait pu apparaître
des mutants, des hommes à deux têtes ou autres légendes qui ont tant
effrayé les Soviétiques (et les autres) il y a vingt-cinq ans.
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